Imperialiter : gouverner comme un empereur quand on n’en est pas un

Table ronde, Carte blanche à Université de Nantes/CRHIA

Appuyée sur un programme de recherche en cours (« Imperialiter. Le gouvernement et la gloire de l’Empire à l’échelle des royaumes chrétiens d’Occident, XIIe-XVIIe s. » https://www.efrome.it/la-recherche/programmes/programmes-scientifiques-2017-2021/imperialiter.html), cette table ronde veut exposer les études les plus récentes sur « l’impérialité seconde » (c’est-à-dire le transfert des caractéristiques de gouvernement impérial à des constructions politiques non impériales). L’idée de départ de ce programme est que le succès de l’idéologie impériale ne se mesure pas seulement dans la volonté de créer ou de proroger des Empires qualifiés comme tels ; mais aussi dans l’influence décisive exercée par la formalisation impériale sur les royaumes (de France, d’Angleterre, de Sicile…), les cités telles que Venise ou Milan et les États pontificaux post-grégoriens. Tous les espaces de l’Occident semblent avoir été touchés par ces transferts d’impérialité, depuis le royaume d’Angleterre jusqu’au roi de France dont on dit, au XIIIe siècle, qu’il est « empereur en son royaume », puis, au XVe siècle, « impérant roi ». - On souhaite évoquer les axes majeurs du gouvernement par l’impérialité seconde en partant de cas spécifiques : ainsi, analyser l'impérialité du gouvernement des Plantagenêt consiste à comprendre comment ils ont su adapter l'exercice de leur pouvoir à l'étendue spatiale trans-manche, à la reconfiguration des échelles des anciens pouvoirs territoriaux, et aux dynamiques sociales, politiques mais aussi identitaires issues de ce nouveau cadre d'exercice de l'autorité royale et princière. La question n’est guère différente pour le royaume de Sicile, qui ajoute à ces défis celui du gouvernement de la pluralité religieuse appuyé sur des héritages impériaux méditerranéens. Quant au royaume de France, le gouvernement impérialisant, étiré jusqu’à l’époque moderne, interroge le modèle classique de la construction de l’Etat-nation « moderne » censé être fondé sur le refus d’un modèle impérial : en réalité, tant les aventures italiennes d’un Charles VIII ou d’un François Ier que les aspirations américaines du second, l’ordonnance de Villers-Cotterêt (1539), la fondation de la Nouvelle France, les candidatures des rois de France à l’empire, voire la révolution française peuvent être relues au prisme du paradigme impérial. Autour de ces trois espaces se déploiera une réflexion sur les modulations renouvelées de l’histoire des pouvoirs. - Car on tient une question majeure : l’impérialité renvoie-t-elle à un mode spécifique de gouvernement (une « rationalité gouvernementale de l’Empire) ou seulement à un réservoir de références, d’images, de rituels liés au souverain, dont toute construction politique peut s’emparer et se servir impunément ? Est-ce (pour reprendre les catégories de Giorgio Agamben) le gouvernement ou/et la gloire ? Imaginaire politique, « raisons de l’empire » (pour reprendre l’étude de Laurent Gerbier), outil de gouvernement, performance du souverain, question de la langue impériale, rapports avec l’Église, théorie juridique, projections eschatologique et usages du théologico-politique : c’est l’ensemble des catégories du gouvernement impérial médiéval et moderne qui sera approché dans le cadre de ces discussions entre participants actifs au programme Imperialiter.

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