Gouverner la violence. État et mouvements sociaux en France aux XXe et XXIe siècles
Table ronde, Carte blanche à l’Institut CGT d’histoire sociale
Gouverner les hommes ne va pas sans administration des choses, organisation et aménagements collectifs qui fondent l’acceptation de l’autorité et justifient le recours à la contrainte. De là découle le « monopole de la violence légitime » dévolu à l’État, dont Max Weber soulignait à la fois la teneur performative et la condition préalable : le consentement des citoyens. Du moins en régime démocratique, lequel se caractérise par la libre expression d’opinions et d’intérêts divergents, voire antagonistes. - Dans l’histoire, la dimension contestataire de mouvements sociaux acquis à la lutte des classes et convaincus du rôle déterminant des épreuves de forces a souvent été perçue comme subversive par les gouvernements et les institutions. Que la protestation puisse conduire à l’exaspération propice à la « brutalité visible », que Jaurès opposait en 1906 à « l’obscurité », non moins violente, des rapports de domination et d’exploitation, est indéniable. Tout comme l’est la confusion, fréquente chez les détenteurs du pouvoir, entre le maintien de l’ordre public, gage du « vivre ensemble » et de la paix civile, et la préservation de l’ordre social, de ses inégalités et injustices, au risque de redoutables conflits de principes propres à compromettre le bien-fondé des coercitions à l’œuvre. Ces dernières années, la lutte contre la loi dite El Khomri, les actions des « gilets jaunes » et la mobilisation contre la réforme des retraites ont relancé les controverses sur la violence, ses causes, ses acteurs, ses modalités, son efficacité et, au total, sa légitimité. - Dans cette perspective, la table ronde se propose d’interroger la violence d’État en France comme pratique de gouvernement face aux mouvements sociaux des XXe et XXIe siècles. Il s’agira notamment d’examiner l’évolution de ses formes, de ses règles, de son degré d’acceptation par la société civile et de ses effets, tant sur l’opinion que sur les stratégies des acteurs sociaux et la vie démocratique.