Genre et despotisme en Islam, 600 ans d’une histoire mouvante.

à l’occasion de la publication de l’ouvrage : Jocelyne Dakhlia, Harems et sultans. Genre et despotisme au Maroc et ailleurs. XIVe-XXe siècle (Éditions Anacharsis) Jocelyne Dakhlia s’entretient une heure durant avec Emmanuel Laurentin au sujet de son dernier livre Harems et Sultans, fruit de dix ans de recherche. Tissant mille et un récits et une iconographie méconnue ou réinterprétée, elle explore 600 ans d’une histoire mouvante du genre et du politique partout en Islam à partir d’un Maroc qui lui sert de chambre d’écho. Sans jamais minimiser les duretés des temps et la violence de l'exercice du Pouvoir, elle s’applique à neutraliser le préconçu selon lequel toute entité politique en pays de tradition musulmane serait condamnée à l'immobilisme historique, à un despotisme pour ainsi dire atavique dont le corollaire est une domination brutale sur les femmes. Démarrant ses réflexions à la fin du Moyen Âge et les principes des littératures canoniques concernant le genre et le politique, Jocelyne Dakhlia établit à quel point le pouvoir, en terre d'islam, est d'abord affaire de négociations, de balances des puissances. Investissant aussi bien les champs concernant les eunuques que les femmes ou les éphèbes l'historienne propose également une réflexion sur l'esclavage et la racialisation. Le politique devient dès lors entendu comme plastique et dynamique. Ré historicisé, il s'avère que le « Harem » (vocable parfaitement inusité avant le XIXe siècle) n'était pas tant un lieu de claustration qu'un espace politique, non cloîtré, mais ouvert et partie prenante dans les débats contemporains. On pourrait sans nul doute avec profit envisager une histoire longue du couvent en Occident selon une perspective similaire…

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