Villes criminelles, villes justicières. Un patrimoine sombre, de l'Antiquité à nos jours
Carte Blanche à Criminocorpus
Le patrimoine judiciaire représente une dimension récente de la réflexion historique sur la ville. Ces lieux liés à la justice ou au crime – quartiers infâmes, emplacements de crimes sanglants, sites d’exécution, espaces carcéraux –, souvent restés dans l’ombre, plus ou moins occultés par la mémoire collective, sont aussi au centre d’enjeux, voire de conflits mémoriels : définition des objets d’études, sensibilité des thèmes, superposition des mémoires, choix de conservation et de valorisation, ces questions peuvent susciter parfois de vifs débats. Faut-il détruire les prisons désaffectées ou les transformer en écoles, bibliothèques ou musées ? Un gibet, un lieu de violence sont-ils à signaler, à scénographier ou à visiter ? Peut-on restituer l'histoire des lieux du crime ou ceux de la peine sans sombrer dans un "dark tourism" complaisant ? Le patrimoine sombre, dans sa matérialité comme dans ses représentations visuelles ou sonores, permet ainsi de tracer un parcours dans l’histoire de la justice comme dans l’espace urbain, que nous explorerons grâce aux ressources de Criminocorpus : visites filmées de prisons et de tribunaux, inventaire des lieux de justice, expositions en ligne sur l’histoire des prisons ou des graffitis carcéraux par exemple. Cette table ronde invite à nous interroger sur la patrimonialisation du monde judiciaire, sa place dans la recherche, au croisement de l’histoire urbaine et d’autres champs historiques, et la valorisation auprès du grand public de ces objets de recherche encore peu visibles, au point de constituer, par sa nature et sa perception, un « patrimoine sombre ».