Quand l’image fait l’événement. De l’instantané à la mémoire
L’image fait événement, soit en informant les contemporains de ce qui se passe, soit en faisant perdurer sa mémoire au travers des siècles. Souvent postérieure à la rumeur ou à la presse écrite dans les périodes anciennes, avec les progrès des moyens de communication et l’avènement du village-planétaire, elle prime dans la diffusion de l’information qu’elle présente en direct, comme lors de l’effondrement des Twin Towers le 11 septembre 2001. Imprévisible, l’événement n’a pas toujours un retentissement immédiat et son sens n’est pas toujours compris de ses contemporains. Inversement, grâce au pouvoir performatif de l’image, un fait peut sembler exceptionnel et émouvoir sur l’instant et, à terme, ne plus être considéré comme un événement : Braudel ne considérait-il pas la mort de Philippe II d’Espagne comme un non-événement dans son œuvre sur la Méditerranée ? L’image contribue ensuite à inscrire le fait dans la mémoire collective, à l’y maintenir présent quitte à ce que son interprétation évolue au grès de ses représentations et à en faire une rupture dont les conséquences à long terme sont encore mesurables.
Depuis 2007, Parlement[s], Revue d’histoire politique accorde une place prépondérante à l’image. Dans chaque numéro sont publiées et commentées des sources iconographiques de toute nature, de l’époque moderne à nos jours : bannières peintes, tableaux historiques, affiches de campagne, de théâtre, militantes, objets de la vie quotidienne, gravures, caricatures, dessins de presse, photographies colorisées, photos de presse, trombinoscopes de l’Assemblée nationale, vidéos… De la photographie prise sur le vif le 23 février 1981, pendant la tentative de putsch aux Cortès, d’emblée iconique, au tableau historique de la mort d’Henri IV peint au XIXe siècle qui devient une image d’Épinal, les couvertures de la revue ont régulièrement exploré le lien complexe entre l’événement et ses représentations, ainsi qu’entre l’énoncé et le contexte d’énonciation de l’image. Grâce à quelques arrêts sur image, la table ronde explorera plusieurs siècles d’iconographie et interrogera le pouvoir d’évocation et de remémoration de l’événement par l’image.