In my mind

Réalisation : Gary Hawkins

Année : 2010

Pays : Etats-Unis

Genre : Documentaire

Alors qu’il se rend à Baltimore assurer un engagement au Comedy Club, le grand pianiste et compositeur de jazz Thelonious Monk est battu et arrêté le 15 octobre 1958 par la police de New Castle, Delaware. En compagnie de Charlie Rouse et de Nica de Koenigswarter, il est inculpé de possession de stupéfiants. Laissé en liberté sous caution, il se voit néanmoins retirer la carte de travail qui lui permet de se produire dans les clubs new-yorkais. S’ensuit une dépression sévère qui le conduit au Sanatorium de Long Island.

 

Son label lui permet cependant de revenir de la plus belle des façons, en préparant dans un loft abandonné de New York, déjà squatté par le photographe Eugene Smith, un concert avec un big band, qu'il donne en 1959 au Town Hall de New York.

 

Cinquante ans plus tard, l'un des pianistes les plus renommés de sa génération, Jason Moran, reçoit commande de recréer ce concert. Seulement, au lieu de simplement le rejouer, Moran le transforme en un hommage à celui qu'il considère comme le plus grand artiste de jazz du vingtième siècle.

Moran conçoit ainsi un véritable spectacle faisant appel à la projection d’images, fixes et animées, dans une mise en scène signée par un vidéaste, David Dempewolf.

Le recours à des documents d’archives a été rendu possible grâce au travail effectué par l’université Duke, en Caroline du Nord – l’État d’où est originaire la famille Monk – qui abrite le «Jazz Loft project», récipiendaire du fonds Eugene Smith : 4 000 heures d’enregistrements sonores et près de 40 000 photographies, produits entre 1957 et 1965, dans l'immeuble de Manhattan, où Smith habitait et où la plupart des grands musiciens de jazz du moment se retrouvaient pour jouer ensemble.

Les répétitions avec ses musiciens ont été filmées, et constituent aujourd’hui le document qui sert de fil rouge à l’hommage que lui rend Moran, auquel s’ajoutent d’autres images montrant Monk sur scène, ou sous l’objectif d’Eugene Smith. De son côté, Dempewolf a tourné dans l’appartement new-yorkais de Moran, ainsi que sur la plantation de Rocky Mount (Caroline du Nord) où les grands-parents de Monk étaient employés comme esclaves et où celui-ci a vécu ses cinq premières années.

Le dialogue ainsi instauré entre Moran et Monk se fait par l’intermédiaire d’un écran, situé derrière l’orchestre, sur lequel ces images sont montrées. Des voix mixées se font entendre, inconnues, ou reconnaissables, comme celle de Monk ou de Moran. Celui-ci, dans son album Artist In Residence (2006), avait déjà employé ce procédé avec la voix d’Adrian Piper («Breakdown the barriers, ...The misunderstandings...»), dont les paroles ont été choisies autant pour leur signification que comme matériau musical. Piper, née à Harlem en 1948, a importé les notions de «race» et de «gender» dans le vocabulaire de l’art conceptuel, avant d’engager une recherche doctorale sous la direction de John Rawls à Harvard et de Dieter Henrich à Heidelberg et de devenir la première femme africaine-américaine à obtenir un poste de professeur de philosophie.

Moran a également fait appel à un artiste, Glenn Ligon, qui a conçu des motifs récurrents, comme pour les mots «In My Mind» ("dans ma têtes")

À l'université Duke, un cinéaste qui y enseigne le documentaire, Gary Hawkins, a écrit et filmé le film que vous allez voir, retraçant l'aventure de la recréation du concert de Monk par Jason Moran.

Jamais montré en France, le CNC, l'IHTP et les Rendez-vous de l'histoire se sont associés pour le sous-titrer en français et le présenter ici, en avant-première.

Christian Delage

Conservatoire de Musique
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