Mettre sa vie en boîte. Les « cellules de nonnes », entre images du quotidien et autoportraits (XVIIe-XXe siècle)

Carte blanche à l'UMR 8589 Laboratoire de médiévistique occidentale de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Entre le 17e siècle et les années 1930, des centaines de religieuses cloîtrées de Bourgogne, de Provence, de Bavière ou de Suisse ont communiqué avec leur famille en produisant objets étonnants et totalement méconnus : des boîtes vitrées dans lesquelles elles se représentent sous une forme miniaturisée, petites poupées en prière, enfermées dans leur cellule, entourées des objets de leur quotidien minutieusement reconstitué (lit, bénitier, crucifix, balai, corbeille à ouvrage, images pieuses…). Insolites, méconnues, ambigües, ces boîtes dévoilent des scènes intimes d’un lieu protégé par le secret de la clôture, plaçant le spectateur dans une position de voyeur... Elles sont autant d’autoportraits de religieuses vouées, en théorie, à l’oubli d’elles-mêmes. La table ronde entend présenter ces scènes de vies mises en volume et en boîtes et en débattre dans une perspective d’histoire renouvelée des objets (notamment celle des dioramas et, plus largement, de la miniaturisation). Elle s’attachera à leur matérialité dans le contexte de l’émergence et du développement de la miniaturisation des objets à partir de l’époque moderne avant d’évoquer tout le parti qu’il est possible d’en tirer pour les historiens, qu’il s’agisse de l’histoire des pratiques religieuses et de la piété mais également des émotions ou de la vie quotidienne, par exemple. C’est pourquoi la table ronde réunira un spécialiste de l’histoire des usages sociaux et économiques des images et des objets (Manuel Charpy), une spécialiste d’histoire des pratiques religieuses (Elisabeth Lusset) et une conservatrice-restauratrice d’arts graphiques (qui a restauré certaines de ces boîtes pour le Museon Arlaten, Laurence Caylux). On débattra de la fabrication, des usages et des finalités de ces images de piété en 3D, massivement produites dans les couvents féminins, puis collectionnées dès la fin du 19e siècle, notamment par le poète Frédéric Mistral, de sorte que le Museon Arlaten d’Arles en conserve une vingtaine. Mais on en compte plusieurs centaines, mal recensées, notamment au Musée d’Art Sacré de Pont-Saint-Esprit, à l’Hôtel d’Agar de Cavaillon ou encore au Musée d’art et d’histoire de Fribourg mais également chez des collectionneurs privés comme à Chalon (une centaine de boîtes collectionnée par l’association Trésors de ferveur) ; régulièrement, on en voit apparaître dans les catalogues de ventes, souvent lors des ventes de « jouets anciens ».

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