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Les Cartes Blanches

L'objet conservé d'un proche décédé : une frontière brouillée entre les vivants et les morts

Carte Blanche à l' ÉPIC (École de psychothérapie institutionnelle de La Chesnaie)

Dans la clinique du deuil, certains endeuillés conservent des restes de leur proche décédé avec lesquels ils prolongent une relation au-delà de la mort. Nous croisons cette pratique de conservation avec un objet de la religion catholique : la relique. La relique est un reste du corps d’un saint, considéré comme objet sacré. Elle est un objet de croyance, de catalyse, d'intercession, d’exemplarité et d’éternité. L'étude anthropologique de la relique nous présente le caractère exceptionnel de ce morceau de corps et l'exception de son inscription dans le rituel funéraire. A un niveau psychopathologique, l'objet-relique peut être l'entame nécessaire pour supporter la perte. L'expérience de deuil est une résurgence de l'objet perdu de la relation à l'Autre Primordial. Face à la détresse de la perte, l'objet-relique est le lieu d'un compromis illusoire (P. Fédida) et d’une surface hallucinatoire (L. Laufer). Ainsi, nous présentons l'objet-relique comme un objet extérieur, orne-mental et para-mélancolique. Généralement, l’objet conservé est progressivement abandonné : la résolution de deuil passe par l'acceptation du verdict de la réalité et l’investissement d’un nouvel objet libidinal. A l'inverse, son arrêt éternel serait à mettre du côté d’une fétichisation de l'objet. Toutefois, nous imaginons un troisième devenir à l’objet, nous l’appelons créativité reliquaire, soit l'enchâssement et l'exposition du vide laissé à la suite de la disparition d'un proche. La sublimation reliquaire est à entendre comme l'expression des effets de deuil sur la vie du survivant. La création reliquaire est l'expression plus rare, potentielle émergence d'un signifiant et d'un lien social nouveau.

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Clinique de la Chesnaie
La Chesnaie - 41120 Chailles