Les spectacles de curiosités, ou comment proposer une histoire et une géographie populaires de l'empire français (XVIIIe-XIXe siècle)
Carte blanche aux Presses universitaires Blaise-Pascal Offerts aux publics les plus divers, à l’occasion des grandes foires, sur les places publiques, dans la rue, les auberges, les maisons privées, les curiosités ont été réduites à des « petits spectacles » par la législation napoléonienne, sans que cela ne les soulage d’une constante surveillance municipale et policière. Quel danger déceler dans des danses sur cordes, dans la ventriloquie, la magie, dans des monstrations d’animaux, de corps humains meurtris et déformés, de lanternes magiques et de panoramas, de cires ou de marionnettes, on en passe ? À l’évidence, une représentation d’un univers onirique qui joue avec et se joue de la réalité française, réécrivant les horizons d’un empire colonial, d’une humanité entre science et charlatanisme, d’une histoire dont on fait s’entrechoquer les périodes et les héros. Alors Robespierre peut rencontrer Charlotte Corday ou le pire des brigands napolitains, Napoléon revivre son sacre en déplaçant au besoin les statues de cire, la religion catholique tenter de reconquérir les esprits par des crèches vivantes, etc. Secours ou alternatives au récit officiel, au roman national, les curiosités offrent, non sans talent et technicité, des vues grossissantes, simplifiées et déformées à des publics captifs dont prétendent se distinguer les bourgeoisies urbaines.