Le XIXe, siècle du culte des morts
Conférence proposée par le Conseil Scientifique Le XIXe est le siècle par excellence du « culte des morts », ce culte familial du souvenir et de la tombe qui fut un des ancrages anthropologiques et culturels les plus répandus et les plus unanimes. Dans les nouveaux cimetières transférés en périphérie d’agglomération, dans les villes d’abord, puis dans les campagnes (avec ou sans transfert), les contemporains ont pris l’habitude de venir régulièrement "visiter leurs morts » en apportant sur leurs tombes fleurs et couronnes. C’est ainsi que la Toussaint est devenue, sous des formes en partie renouvelées, la fête la plus populaire du calendrier liturgique, croyants et incroyants réunis. Dans les années 1820, devant le spectacle commençant des pèlerinages sur les tombes au Père-Lachaise, le grand écrivain romantique Benjamin Constant, qui distinguait le « sentiment religieux » (éternel et perpétuellement resurgissant) de ses « formes » variables et évolutives, croyait voir « planer le sentiment religieux sur sa propre forme ». Comment mieux dire que la forme par excellence du sentiment religieux au XIXe serait funéraire ? C’est à essayer de décrire et de comprendre les raisons du succès de cette invention sacrale du XIXe, sans équivalent sous l’Ancien Régime, que sera consacrée cette conférence. XIXe qui s’est prolongé fort avant dans le XXe, voire le XXIe siècle, puisqu’en 1966 encore, dans le texte pionnier qu’il a consacré à ce culte, Philippe Ariès ne paraissait pas encore se douter qu’il pût décliner un jour.