Le chantier cathédral, lieu de travail au Moyen Âge
Par sa dimension monumentale, par sa durée, par les moyens mobilisés, la construction d’une cathédrale semble sans commune mesure avec la plupart des activités menées entre le XII° et le XV° siècle. Et c’est comme des exceptions que, très tôt, les chantiers cathédraux ont été envisagés et valorisés ; leur étude se développant de manière presque autonome par rapport à celle des métiers médiévaux. Dans un monde considéré comme « dominé par l’artisanat », l’accent a été mis sur l’or des cathédrales, la figure de l’architecte, la loge des tailleurs de pierre, l’imposante main d’œuvre salariée ou le recours aux machines. L’atelier domestique et le chantier cathédral sont pourtant fruits d’une même société. Ils s’enracinent dans une même population, un même environnement, une culture commune. Les sources témoignent d’échanges qui brisent l’isolement historiographique du chantier monumental et réduisent les différences à une question d’échelle. La cathédrale peut alors devenir un point d’observation privilégié des techniques et des pratiques professionnelles. Sa démesure peut, en retour, être reconsidérée à l’aune d’une approche technique, sociale et économique renouvelée, qui ancre le chantier cathédral dans les pratiques de son temps. Cette intervention se propose d’explorer ce thème sous l’angle des idées reçues, de la construction historiographique et des apports récents de la recherche, réinterrogeant la nécessité de défrichements intensifs pour édifier les charpentes de ces églises ou l’élan spirituel engageant toutes les strates de la population à participer à ces chantiers.