La guerre des récits - Christine Ockrent
Pour Xi Jinping, Vladimir Poutine et Donald Trump, le combat contre la pandémie s’accompagne d’une rivalité renouvelée pour convaincre le monde que leur modèle est le meilleur : modèle politique, économique, sociétal, culturel et sanitaire bien sûr. Le Covid-19 inflige à la planète une épreuve sans précédent ; partout les dirigeants sont contraints de l’intégrer dans un récit national ajusté à de macabres statistiques. Dans l’arène géopolitique, les rapports de force entre les trois acteurs principaux en sont affectés.
Le premier frappé, le pouvoir chinois jugule l’épidémie au prix de méthodes drastiques et d’une censure alourdie. Il se veut exemplaire, transformant en propagande la catastrophe qui menace ses ambitions impériales. Incurie du système sanitaire et social, politisation des enjeux en pleine campagne électorale - les États-Unis se replient sur eux- mêmes, mais Donald Trump veut faire payer à la Chine la récession qui brise son grand rêve américain et menace sa réélection. Dans ce triumvira, la Russie trébuche : son économie est trop faible pour résister à la crise du pétrole.
Toute à ses propres douleurs, l’Europe, absente de cette compétition, n’a pas su construire le récit dont elle aurait tout lieu de s’enorgueillir. C’est en spectateurs qu’à chaque étape de la pandémie, nous observons cette concurrence entre récits et modèles pour gagner à leur cause les plus inquiets et les plus vulnérables, même au sein de nos propres sociétés. Mais le combat n’est pas fini, et nos atouts n’ont pas disparu.
