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Critique de l'histoire des sciences

Carte blanche à CNRS Éditions

Le sens et le contenu de l'expression « histoire des sciences » tout comme ceux du terme « science » sont loin d'aller de soi. Il y a bien, par exemple, « science » aux XVIIe et XVIIIe siècles, mais sans que soit introduit le concept d'énergie et sa conservation ; est-ce la même science que notre science moderne qui s’ordonne précisément autour du concept d'énergie dont Gaston Bachelard affirme la « primauté rationnelle »?

Et si l’on remonte un peu le cours des siècles, la situation se complique. De quelle « science » parlons-nous lorsqu’on présente les travaux « scientifiques » des Anciens ou des médiévaux ? En parlant d’histoire de science, on a toujours tendance à en faire remonter l’origine à l’antique bassin méditerranéen et aux Grecs. Mais en quel sens la « science » des Grecs a-t-elle à voir avec la nôtre ? En quel sens peut-on dire qu’il y a une « science » médiévale qui serait comme un moment, une étape, d’avant la nôtre ? Doit-on considérer l’ensemble du travail des Anciens et des médiévaux comme comme l’enfance de notre belle « science », dont nous serions la maturité ? Belle prétention, qui ne semble percevoir dans les écrits de nos prédécesseurs que des efforts, souvent naïfs et vains, pour nous permettre de devenir ce que nous sommes. Nos prédécesseurs ignoraient ce que nous serions et que nous attacherions de l’importance à telles ou telles choses. Ils se préoccupaient très sérieusement, sans penser à nous, de la construction de mondes ayant leur propre signification, leur propre imaginaire, leur propre cohérence. La « science » telle que nous la concevons aujourd’hui n’est pas nécessairement, loin de là, le fin mot de l’accomplissement d’une société et d’un monde.  Ainsi, la question du « progrès » n’a pas grande signification d’un point de vue général ou absolu. La pensée aristotélicienne, par exemple, n’est ni fausse, ni périmée. Elle est sa propre. Rechercher, comme on le fait trop souvent, chez nos prédécesseurs, dans une sorte d’esprit linéaire et cumulatif, ce qui, par une sorte de miracle, ressemble à ce qui nous intéresse aujourd’hui, est une faute de la pensée, mais, plus encore, une injure faite à la richesse de la pensée et de la réflexion de nos prédécesseurs.

Cela ne signifie pourtant pas que leurs constructions intellectuelles nous soient totalement inaccessibles bien que nous soyons confrontés à leur originalité ; non, un chemin traverse la pensée occidentale depuis les Grecs : celui de l’ordre démonstratif, lancé par les Eléments d’Euclide, prolongé en terre d’Islam et renforcé à partir du XVIᵉ siècle en Occident, où les mathématiques comme nous les connaissons naissent vraiment. En prenant une position résolument critique, en revisitant les approches historicisantes de l’histoire des sciences, en interrogeant l’homogénéisation idéologique des pensées dans l’histoire globale, Michel Blay développe une nouvelle sensibilité aux constructions du passé comme à celles du présent, et ouvre une nouvelle voie pour l’avenir

 

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