Art et mythes dans les massifs centraux sahariens au cours du IIIè millénaire Av-JC
Carte blanche aux Presses universitaires du Midi (PUM).
Le Sahara central constitue, par la qualité et l’abondance de son art rupestre, un véritable conservatoire à ciel ouvert où sont rassemblés d’extraordinaires témoignages de la vie des bergers néolithiques (fin du VIe millénaire - fin du IIIe millénaire avant notre ère). Comment comprendre et interpréter cet art des rochers ? Pourquoi des images ? Pourquoi ces représentations d'un réalisme surprenant succèdent-elles aux images schématiques et mystérieuses des sociétés « Têtes Rondes » confrontées à un monde en mutation ?
En archéologue de la paroi ornée, l’auteur analyse les représentations rupestres dans le sens inverse de la démarche intellectuelle de l’artiste préhistorique qui a illustré une narration, mythologique par hypothèse. L’auteur propose ainsi de retrouver, à partir des thèmes et des structures organisant l’image, l’essence du mythe qui en est à l’origine.
En distinguant le mythe – trouble de l’inconscient collectif – des récits mythologiques qu’il engendre, l’étude fait émerger par touches successives la raison de ces étonnantes compositions. En faisant converger les méthodes de l’archéologie préhistorique, de l’histoire de l’art et de l’anthropologie sociale et culturelle, l’analyse met en oeuvre les principes méthodologiques d’une anthropologie de l’art rupestre. Enfin, en confrontant les résultats de ces disciplines aux données de l’écologie préhistorique saharienne, l’étude fait apparaître les possibles causes de tension et de conflit entre les groupes de pasteurs nomades. En se fondant sur le postulat que l’art rupestre bovidien reflète pour une large part des évocations issues de récits mythologiques anciens, l’étude considère les peintures et les gravures rupestres comme des témoignages volontaires faits pour signifier. En ce sens, ces images matérialisent, par les caractères formels des figures et des compositions, les préoccupations profondes de ceux qui ont pris soin de les inscrire sur ou dans la pierre. Derrière le réalisme de la représentation se terre un sens caché qui est en même temps une manière de penser la société, de proposer un modèle social et de rappeler les moyens pour en conserver l’équilibre au sein d’un espace de vie en cours de rétraction.
Avant que l’aridité et la désertification ne favorisent l’avènement d’une société protohistorique de marchands et de guerriers, les pasteurs du Néolithique final ont mis en place vers la deuxième moitié du IIIe millénaire avant notre ère les conditions permettant l’instauration et le maintien pour un temps d’une grande civilisation pastorale. Les récits qui en expriment l’essence sont à jamais perdus ; le mythe qui les a générés transparaît parfois.