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La science peut-elle sauver l’environnement ?

Carte blanche à l'Association pour l'Histoire de la Protection de la Nature

« Le propre de notre civilisation occidentale est d’attendre le Père Noël des techniques » (Dominique BOURG). Cette attente est particulièrement notable depuis le XIXe siècle, siècle scientiste par excellence, en Europe et aux États-Unis d’abord, où le progrès semblait permettre tous les espoirs : aucun problème en effet qui ne paraisse trouver une solution par une invention ; aucune difficulté qui ne paraisse pouvoir être résolue par la science. Ce mythe du progrès a pourtant été bien contesté dès sa naissance comme l’a montré François JARRIGE (Technocritiques, Paris, La Découverte, 2014). Il est aussi considérablement écorné au cours du XXe siècle, lorsque les bouleversements apportés par la technique au monde naturel ont semblé trop considérables : la menace nucléaire est centrale bien entendu dans cet effritement, mais elle n’est pas seule ; il faut aussi prendre en compte, entre bien d’autres, les pollutions chimiques (que l’on songe par exemple à l’influence de l’ouvrage de Rachel CARSON, Silent Spring, en 1962, dénonçant les méfaits du DDT sur la chaîne alimentaire), les effets de l’agriculture intensive ou, plus récemment, l’impact du changement climatique.
Reste qu’on peut s’interroger aujourd’hui encore sur notre rapport à cette idéologie. La notion d’anthropocène elle-même, qui pointe l’ampleur des dégâts provoqués par l’espèce humaine à la planète, peut amener certains à suggérer d’user de cette puissance anthropique pour régler les problèmes qu’elle a créés (à l’instar des propositions d’injecter de grandes quantités de dioxyde de souffre dans l’atmosphère pour enrayer le réchauffement climatique). Par ailleurs, en accusant l’humanité, l’anthropocène peut dispenser d’une réflexion sur la responsabilité propre de la civilisation européenne dans l’établissement de cette adoration du progrès.
Il convient donc d’interroger historiquement la façon dont cette foi dans les capacités de la science à protéger l’environnement, à résoudre les défis que l’humanité lui pose, s’est construite et transformée, s’est imposée, a été contestée mais reste prégnante. C’est ce que se propose cette table-ronde, en faisant intervenir un biologiste, Pierre-Henri GOUYON, Professeur au Muséum national d’Histoire naturelle, et deux historiens, Laurent COUMEL, spécialiste de la Russie et des transformations environnementales, et François JARRIGE, auteur de nombreux travaux sur les techniques, l’industrialisation, et leurs contestations. Au-delà de la question du climat, on pourra ainsi s’intéresser à la sauvegarde de la biodiversité, à la question de l’indépendance de la recherche et de l’expertise face aux lobbies industriels, aux conséquences des interventions techniques sur les écosystèmes. Au final, il s’agira bien de se demander si l’innovation scientifique est en mesure d’absoudre l’homme d’une remise en cause de ses modes de vie.

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